Andrea, le nouveau camp de base de Nina Caprez

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2021-11-28 18:30:33

Une aventure humaine à la rencontre des populations reculées.

Fondée en 2020 par Nina et son compagnon le photographe outdoor français Jérémy Bernard, Andrea est une organisation suisse à but non lucratif dont le but est d’explorer, de rencontrer et de partager à travers les valeurs positives et inspirantes du sport.

Avec chacun leur propre expérience, ils voyagent ainsi à bord de leur camion d’expédition à travers des régions éloignées, à la rencontre des communautés locales.

Après de nombreuses années en compétition, Nina presse le bouton pause et quitte le circuit. Que faire alors ? Vers quoi se réorienter ?

« J’ai d’abord eu l’occasion de participer au programme Be The Hero by Arkose en tant que Earth, où j’ai pu passer du temps avec des jeunes grimpeurs moins expérimentés, les inspirer avec mon histoire et ma carrière un peu atypique.

Cela faisait presque 3 ans que j’avais l’impression de tourner un peu en rond, de répéter chaque année un cycle. Je voulais évoluer différemment, prendre de nouvelles directions qui donneraient un peu plus de sens à mon monde, à ma vie. Une de ces directions, je l’ai trouvée en éprouvant un profond plaisir au partage et à la transmission de ma passion aux plus jeunes. »

Quelques temps après la création du programme Be The Hero, Nina et son compagnon se lance dans un deuxième projet aux valeurs similaires de partage et d’ouverture : Andrea !

L’aventure débute en Europe de l’Est avant de se poursuivre vers l’Afrique du Nord, le Moyen-Orient et l’Asie.

La particularité d’Andrea ?Un camion tout-terrain doté d’un mur d’escalade amovible et d’une plateforme qui permettent à Nina de proposer un espace mobile et modulable où pratiquer l’escalade, et surtout accessible pour tous.

Vous êtes prêts ? Nina nous raconte son aventure

« Une autre direction encore, parallèle mais concordante s’est présentée à moi avec le projet Andrea, lancé avec mon conjoint Jérémy. On a eu l’idée de créer une sorte de camp de base mobile, depuis lequel on peut inspirer et sensibiliser aux valeurs du sport à travers l’escalade et la photographie. C’était une idée un peu folle qui m’a demandé beaucoup de courage et de conviction.

On a construit ce projet sur un Unimog, un camion qui peut aussi bien se déplacer loin que rester sur place. On cherchait un véhicule assez solide pour pouvoir accueillir et stocker un mur d’escalade, mais aussi accueillir des gens et du matériel de sport tout en ayant accès à des régions reculées. »

« C’est un projet ambitieux, pas toujours facile à justifier auprès des gens car à première vue, un gros camion, ça pollue…

Malgré tout nous étions convaincus dès le début qu’on allait en faire bon usage, conduire avec intelligence et mener des actions qui allaient marquer et changer les communautés. »



De l’idée à la réalisation, une aventure riche en découvertes et en challenges.

« La conception et la construction nous ont pris plus d’un an, mon projet théâtre (on vous parle de ce projet très bientôt) me demandant énormément de temps et d’énergie. Tout ça ne m’a pas laissé énormément de temps pour grimper et être dans la nature. Et ça, ça a été un vrai challenge pour moi !

La nature m’offre un équilibre de vie essentiel et il ne faut pas oublier que l’escalade de haut niveau a été au cœur de ma vie pendant ces 20 dernières années. Pour être tout à fait honnête, il m’a fallu bien des efforts pour surmonter ce qui représente pour moi des sacrifices ! Mais je suis prête à parier que bien des sportifs de haut niveau traversent cette phase de transition un jour ou l’autre et perdent un peu, tout comme moi, leurs repères.

Malgré le défi que ces nouvelles directions représentent, il est clair qu’elles ouvrent une suite à ma carrière. Je me retrouve profondément dans les valeurs du sport où j’ai toujours cherché à mêler expression artistique et style. »

« J’ai souvent douté, eu même envie d’arrêter à plusieurs reprises, me sentant trop perdue et désorientée… J’avais envie de revenir en arrière pour me sentir puissante et dominante dans mon sport, en particulier dans ma discipline : les grandes voies difficiles dans lesquelles je me suis épanouie ces 10 dernières années. 

Mais je suis contente d’avoir tenu bon, de m’être accrochée. Je découvre que je suis beaucoup plus que ça, et qu’il était temps de me lancer autrement, sur d’autres voies. Je suis une personne curieuse, j’ai envie d’évoluer et d’apporter quelque chose de neuf à ce monde.Mais wahou, il a fallu que je m’accroche ! »

Le temps du départ.

« Le 1er août à Béranger, nous collons le dessin fait par Chris Bencheteler sur Andrea avec mes anciens voisins de Grenoble, Jean et Pauline. Deux jours après, nous prenons la route, direction l’Est où nous passons un bon moment en famille en Suisse, dans le Prättigau. Une occasion aussi de pouvoir nous remettre correctement au sport et de tester pour la première fois le mur d’Andrea.”

Nous organisons un week-end de fête avec la famille, les amis et les gens qui nous ont aidés pour le projet. Jeremy et moi montons le mur ensemble pour estimer le temps que cela allait nous prendre. Au total il faut 5 heures de montage, plus la gestion des problèmes, puis 3 heures de démontage. Mais nous aurons l’occasion de gagner en efficacité au fil des escales… La fête est belle, douce et gaie… »




« Mi-septembre, nous voilà en Roumanie dans la vallée de Jiu, une des régions les plus pauvres du pays. Ancienne vallée minière, cette région a aujourd’hui une très mauvaise image. La pauvreté est énorme, les gens vivent entassés dans des anciens immeubles communistes ressemblant à des cages à poules délabrées. La plupart des habitants n’ont ni eau courante ni chauffage. Ils achètent des habits de seconde main pour pouvoir les brûler et chauffer leurs appartements. Ils sont mal nourris car ils ne peuvent s’acheter que des aliments de mauvaise qualité. C’est une vallée où la mafia, la corruption, la drogue et la prostitution sont omniprésents.

Pour Jérémy et moi, ce n’est pas du tout sécurisant, mais nous sommes rassurés par l’accueil que nous recevons. L’association « Fara Limite » a créée une salle de bloc en pleine zone il y a 6 ans avec pour but d’offrir aux gens un endroit protégé, un abri pour les jeunes de la vallée qui ont la vie dure, la vraie vie dure. »


« Pendant 10 jours, nous participons à leur programme,et « Fara Limite » nous donne carte blanche. Nous grimpons donc avec eux dans la salle de bloc, nous les accompagnons en falaise et on passe tout un week-end dehors dans les belles forêts roumaines, coupés du monde. Jérémy lui, organise des ateliers photo avec eux et nous leur proposons même des soirées films et projections photos.

Pour finir, nous montons le mur d’Andrea en plein ghetto et nous organisons une compétition. Plus de 70 gamins et ados ont participé, c’était simplement énorme car 80% d’eux grimpaient déjà à la salle et avaient donc une bonne connaissance du sport. »


« En fin de compte, ce fût un séjour intense et très émouvant. J’ose croire que notre présence et notre volonté de vouloir passer du temps avec eux auront un peu allégé et marqué d’une manière positive la vie de certains.

Pour moi, il est toujours difficile de voir la vie des gens moins fortunés. Il est très dur d’accepter que leur futur n’est pas vraiment prometteur et d’admettre que leurs chances de finir en difficulté sont grandes. Mais c’est aussi pour cela qu’on a créé ce projet, Andrea est un outil tangible pour échanger, partager et inspirer. »

« Aujourd’hui, je me sens comblée et je suis fière de moi. Certes je ne grimpe plus dans le 8c, mais j’ai trouvé des projets qui sont toujours liés au sport et qui me rapprochent d’une vie qui me semble plus réelle. Ces expériences me créent aussi des histoires que je pourrai un jour raconter aux jeunes de chez nous pour qu’ils puissent être inspirés à leur tour.

Ce sont des histoires avec un sens de l’aventure et du partage profond car je peux assurément vous dire une chose : faire une grande voie en 8b est en fin de compte bien plus simple que de passer 10 jours dans le Ghetto de Vulcan !”



Merci à Nina pour ce récit inspirant, et à Jérémy Bernard pour ces sublimes photos qui nous permettent de vivre un peu de cette aventure.

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